par Clément Hudon, Pl. Fin., FCSI, BAA, M. Sc.
Professeur en planification financière
École des sciences de l’administration
Université TÉLUQ
Avec la collaboration de Jonathan Mercier, coordonnateur des activités d’éducation financière chez La Capitale services conseils inc.
MA RENTE DE RETRAITE QUÉBEC, JE VAIS LA RETIRER À QUEL ÂGE?
Dans mon rôle de planificateur financier, j’ai souvent été interrogé sur l’âge idéal pour commencer à toucher la rente de retraite de Retraite Québec (anciennement la Régie de rentes du Québec).
Dès 60 ans, il est possible de retirer sa rente, mais il faut savoir que les montants sont réduits, car il faut normalement attendre à 65 ans. À cet âge, on a droit à une pleine rente. Toutefois, si l’on patiente jusqu’à 70 ans, notre rente est bonifiée[1].
Comme l’on ne dispose pas d’une boule de cristal, il est difficile de statuer sur la situation du client, puisqu’on ignore l’âge auquel il mourra. Par conséquent, le planificateur financier a tendance à se renseigner sur l’historique familial de son client et à se fier aux tables de mortalité pour le conseiller.
Pour plusieurs clients, ce n’est pas tant le besoin d’argent qui les pousse à vouloir toucher une rente à 60 ans, mais la crainte d’être perdants s’ils meurent avant 65 ans ou même 70 ans. Ils ne souhaitent pas « laisser de l’argent sur la table ».
Évidemment, ils pensent à leur succession, mais l’idée demeure la même. Ils croient que s’ils attendent, leur « patrimoine » sera perdant à leur décès.
EXEMPLE D’UNE STRATÉGIE DE PLANIFICATION SUCCESSORALE
Imaginons le scénario suivant : Robert est âgé de 59 ans, presque 60 ans. Il n’a jamais fumé et n’a aucun problème de santé. Comme on dit, Robert est « assurable ».
S’il choisit de recevoir sa rente dès 60 ans, son revenu mensuel maximal sera de 725 $. Il y aura donc un manque à gagner de 408 $ par mois (4 900 $ par année) par rapport au fait de toucher sa rente à 65 ans et de 885 $ par mois (10 616 $ par année) par rapport au fait d’attendre à 70 ans[2].
Afin de protéger son patrimoine familial, notre retraité pourrait simplement demander sa prestation dès 60 ans et contracter une assurance-vie.
Si Robert investissait la presque totalité de sa rente de Retraite Québec, soit le montant de 5 026 $ de la rente nette de 5 226 $ reçue annuellement, dans une police d’assurance-vie pendant 10 ans, soit de 60 à 69 ans (la journée avant son 70e anniversaire), son patrimoine familial augmenterait de 70 000 $ lors de son décès, avant ou après l’âge de 70 ans.
En bref, Robert investirait 50 260 $ (10 x 5 026 $) pour un retour de 70 000 $ sans aucun risque. Si Robert mourait avant 70 ans, l’investissement serait réduit en fonction du nombre d’années, mais le paiement d’assurance-vie demeurerait le même.
Si Robert ne mourait pas avant 70 ans, il utiliserait à compter de cet âge sa rente de Retraite Québec pour ses dépenses personnelles, bien qu’il s’agisse d’un montant réduit. Certains me poseront la question suivante : « Si Robert mourait à 85 ans ou même à 80 ans, aurait-il été préférable qu’il touche sa rente à 70 ans?
Comme l’indique le tableau ci-dessous, le décès de Robert à 80 ans procurerait un gain de 8 304 $, alors qu’un décès à 85 ans lui occasionnerait une perte de 23 544 $, compte tenu du montant de 70 000 $ non imposable de la police d’assurance-vie, duquel on déduit 50 260 $ pour le coût de cette même assurance-vie.
CONCLUSION
Si Robert mourait avant 70 ans comme il le craignait, sans pouvoir profiter de sa rente maximale, cette stratégie serait avantageuse, même s’il mourait à 80 ans. Par contre, si Robert avait le « malheur » de vivre jusqu’à 85 ans ou plus, cette stratégie serait perdante.
Comme pour toute autre décision, cela dépend vraiment de l’objectif du client, car il faut tenir compte de son taux d’imposition, de ses besoins financiers, de ses montants d’épargne déjà accumulés (REER, CELI ou autres), de son droit à certains crédits d’impôt, etc., pour élaborer une stratégie.
LE RÔLE DU PLANIFICATEUR FINANCIER
L’élaboration de ce genre de stratégie fait partie du quotidien d’un planificateur financier. En fonction de ses permis d’exercice, il vous conseillera et saura s’entourer d’autres professionnels, selon les expertises requises.
Comme le précise l’Institut québécois de planification financière (IQPF)[3]:
La planification financière personnelle est un processus qui consiste à optimiser votre situation financière et votre patrimoine. La planification financière intègre les connaissances des sept domaines suivants : aspects légaux, assurance et gestion des risques, finances, fiscalité, placements, retraite et succession.
Le rôle du planificateur financier est de vous aider dans l’élaboration de votre planification financière en vous traçant un plan d’action stratégique entièrement adapté à vos besoins et tenant compte de vos contraintes et de vos objectifs personnels. Il vous propose ensuite des stratégies et des mesures cohérentes et réalistes pour atteindre les objectifs que vous vous êtes fixés. Ce sont des atouts précieux pour suivre de près l’évolution de votre patrimoine et prendre la bonne décision au bon moment.
N’hésitez donc pas à consulter un planificateur financier reconnu par l’IQPF[4].
[1]. Voir le site de Retraite Québec sur le sujet : https://www.rrq.gouv.qc.ca/fr/programmes/regime_rentes/rente_retraite/Pages/montant_rr.aspx
[2]. Pour cet exemple, tous les montants sont imposables et font fi de l’inflation.
[3]. Citation tirée de la page « Services au public » du site de l’IQPF : https://www.iqpf.org/services-au-public
[4]. Voir la page « Services au public » du site de l’IQPF : https://www.iqpf.org/services-au-public/repertoire