La loi sur le patrimoine familial, 32 ans déjà

par Clément Hudon, Pl. Fin., FCSI, BAA, M. Sc.
Professeur en planification financière
École des sciences de l’administration
Université TÉLUQ

Note : Ce texte, un brin humoristique, présente la situation des couples comme étant composées d’un homme et d’une femme, situation actuellement majoritaire au Québec. Néanmoins, les informations qui y sont mentionnées s’adressent à tous les couples.

La loi sur le patrimoine familial, 32 ans déjà

Le 1er juillet prochain, la loi sur le patrimoine familial aura 32 ans. Après 32 ans de service, plusieurs travailleurs possédant un fonds de pension (ex. régime à prestation déterminée) sont à planifier leur retraite, laquelle arrivera au plus tard à 35 ans de service pour la majorité d’entre eux. Après 35 ans de service, dans la plupart des cas, cela donne droit à 70% de ses revenus comme rente, pour la vie.

Pour un revenu de 100,000$ par année, notre pensionné s’imagine donc à la retraite avec une rente de 70,000$ et malgré une baisse de 30,000$ par année, avec les dépenses liées au travail en moins, il devrait maintenir son rythme de vie. Faites attention aux indexations partielles, cela diminuera votre pouvoir d’achat rapidement.

Mais voilà que notre futur rentier se questionne. Il est conjoint de fait depuis le moment où il a débuté son travail chez son employeur. Il n’a jamais voulu se marier afin de ne pas partager son fonds de pension avec sa conjointe, en cas de divorce. Étant donné que sa conjointe a eu plusieurs petits emplois et qu’elle s’est occupée des enfants lorsque ceux-ci étaient jeunes, elle n’a ni fonds de pension ni épargne.

Elle sera donc dépendante financièrement de son conjoint pendant sa retraite, comme pendant la vie active de celui-ci, mais avec moins d’argent à partager. Notre futur rentier se questionne si sa conjointe des 35 dernières années « mérite » de partager sa rente avec lui, celui-ci ne s’étant pas marié justement parce qu’il ne voulait pas partager son fonds de pension en cas de divorce.

Si j’étais la conjointe, je serais nerveuse. Quelle sera la décision du futur rentier si celui-ci commence à faire l’équilibre entre les petites chicanes de sa vie de couple, de sa relation aujourd’hui en la comparant à il y a 35 ans, et du montant qu’il devra partager?

La maison est à son nom, elle n’avait pas d’emploi assez stable, il pourrait simplement lui demander de quitter. Il conserve la maison et 100% de sa rente.

Cette mise en situation peut en bouleverser plusieurs qui rétorqueront « Mais qui se comporterait ainsi après 35 ans de vie commune? ». Parfait, et après 10 ans ou 20 ans seulement, c’est correct? La conjointe se retrouve démunie à l’âge de la retraite?

Bon, vous me direz que je suis cynique et bien non. Ma source d’inspiration est double. La première un article intitulé « « Il vit à mes crochets, je m’inquiète pour ma retraite »[1]. Ma deuxième, une situation au camping que je fréquente où, monsieur avait affiché un avis légal annonçant que madame n’avait plus accès à la roulotte de monsieur au camping et la maison d’hiver en Floride et cela, malgré plus d’une décennie en couple.

Dans le premier cas, madame s’interroge si elle doit mettre monsieur dehors avant sa retraite et dans le deuxième, monsieur n’y songe plus, il a mis madame dehors. Mais attendez, il l’a quand même aidé à emménager dans son petit studio, au nom de madame évidemment, monsieur n’est quand même pas sans cœur.

Pour votre information, à 65 ans, les montants des paiements de la Sécurité de la vieillesse[2] (PSV) seront de 7,384$ annuellement en 2021, si on ajoute le supplément de revenu garanti, un montant maximum de 11,029$ par année pour une personne célibataire, notre nouvelle esseulée sans régime de retraite ou d’épargne, aura une « rente » annuelle maximale de 18,414$, un équivalent hebdomadaire de 354$. Imaginez tout ce que vous pourrez faire avec 354$ par semaine.

Rassurez-vous, il n’est pas trop tard et il existe une solution simple, mais audacieuse. Les conjointes qui sont dans cette situation pourraient rencontrer un notaire et signer CONJOINTEMENT ET VOLONTAIREMENT avec leur conjoint, une « convention d’union de fait »[3].

Dans ce contrat on pourrait préciser RÉTROACTIVEMENT qu’en cas de séparation, les régimes de pension seront séparés à parts égales en fonction du nombre d’années de vie commune. J’ajouterais les REER, CELI et RRQ et pourquoi pas, la résidence si elle n’est pas déjà aux deux noms. Tant qu’à être chez le notaire, j’en profiterais pour rédiger les testaments[4] et les mandats de protection[5]. Par la suite, je validerais les différentes polices d’assurances vie de monsieur afin d’en connaître les bénéficiaires.

Et si le conjoint refuse vous me direz. Alors, je communiquerais avec un planificateur financier RAPIDEMENT dans le but de dresser un plan d’action afin de pouvoir faire face à ma propre retraite dans le but de ne pas être dépendante financièrement de mon conjoint actuel au cas où, il deviendrait éventuellement mon ex-conjoint.

En passant, si le conjoint accepte, une visite conjointe chez un planificateur financier serait aussi un geste prudent, pour l’avenir financier de chacun. Histoire de s’assurer que vos différents scénarios sont réalistes.

Finalement, je sais que pour les fins de cet article et comme c’est souvent le cas dans les exemples classiques, on place le rôle du méchant au masculin, dans les mains du conjoint alors que celui de la victime, au féminin, dans les mains de la conjointe mais, rassurez-vous, c’est en train de changer car les femmes prennent de plus en plus leur place sur le marché du travail et avec raison.

Elles sont déjà majoritaires dans les universités et ce sont elles qui occuperont les emplois très bien rémunérés avec fonds de pension, REER, CELI et RRQ bien garnis. De plus, ce sont elles qui auront la maison à leur nom et ce seront elles qui proposeront l’union de fait à leur conjoint afin de protéger leur patrimoine financier d’un divorce.

Évidemment, les conjoints vont sans doute devenir plus romantiques et proposer le mariage comme la plus belle preuve d’amour, mais, méfiez-vous mesdames!

LE RÔLE DU PLANIFICATEUR FINANCIER

Ce genre de conseil fait partie du quotidien d’un planificateur financier. En fonction de ses permis d’exercices, il vous accompagnera et saura s’entourer d’autres professionnels selon les expertises requises.

Comme le précise l’Institut québécois de planification financière (IQPF)[6]:

La planification financière personnelle est un processus qui consiste à optimiser votre situation financière et votre patrimoine. La planification financière intègre les connaissances des sept domaines suivants : aspects légaux, assurance et gestion des risques, finances, fiscalités, placements, retraite et succession.

Le rôle du planificateur financier est de vous aider dans l’élaboration de votre planification financière en vous traçant un plan d’action stratégique entièrement adapté à vos besoins et tenant compte de vos contraintes et de vos objectifs personnels. Il vous propose ensuite des stratégies et des mesures cohérentes et réalistes pour atteindre les objectifs que vous vous êtes fixés. Ce sont des atouts précieux pour suivre de près l’évolution de votre patrimoine et prendre la bonne décision au bon moment.

N’hésitez donc pas à consulter un planificateur financier reconnu par l’IQPF[7].


[1]https://www.lapresse.ca/affaires/finances-personnelles/2020-12-06/train-de-vie/il-vit-a-mes-crochets-je-m-inquiete-pour-ma-retraite.php

[2] https://www.canada.ca/fr/services/prestations/pensionspubliques/rpc/securite-vieillesse/paiements.html#tbl1

[3] https://www.cnq.org/fr/famille-couple/79-pourquoi-conclure-une-convention-dunion-de-fait-.html

[4] https://www.cnq.org/fr/succession-testament/100-pourquoi-faire-un-testament-.html

[5] https://www.cnq.org/fr/famille-couple/69-a-quoi-sert-le-mandat-de-protection-.html

[6] https://www.iqpf.org/services-au-public

[7] https://www.iqpf.org/services-au-public/repertoire

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